Jazz In Lyon

Un joli hold-up

Bandit 65

Le jeudi 18 janvier dernier, le Bandit 65 de Kurt Rosenwinkel était à Valence pour régaler l’audience de ses expérimentations sonores. Invité par Jazz Action Valence, ces chamans modernes ont emmené leur public dans un voyage initiatique entre Jazz, Rock et Trip Hop.

C’est une bien belle saison que nous propose cette année Jazz Action Valence (JAV). Après le pianiste Enrico Pieranunzi et son trio en décembre dernier, le guitariste Kurt Rosenwinkel était là avec le sien le 18 janvier dernier. Suivront le saxophoniste Thomas de Pourquery en février, la batteur Anne Pacéo en mars, la chanteuse Oum en avril et le contrebassiste Jean-Philippe Viret en mai. Une belle brochette de musiciens qui conforte la JAV dans sa position d’acteur majeur du Jazz dans la Drôme et même plus largement, en Rhône-Alpes.

Sur la route 65

Le Bandit 65 est composé de Kurt Rosenwinkel et Tim Motzer aux guitares et de Gintas Janusonis à la batterie et aux percussions. Outre leur instrument respectif, chacun de ces musiciens manipule également en live des boucles et des effets électroniques. Ceci donne l’impression d’avoir face à soi tout un orchestre, les guitares sonnant tour à tour comme des orgues, des claviers électroniques ou comme des instruments à vent.

Alors que Tim Motzer joue sur une guitare électro-acoustique, Kurt Rosenwinkel utilise lui une guitare électrique (Gibson ES335). Les instruments, les effets et les façons de jouer des deux guitaristes sont très différents. En live, nous distinguons donc clairement deux voix qui se répondent et s’accompagne mutuellement.

Kurt Rosenwinkel compte parmi les meilleurs guitaristes de la scène actuelle du Jazz américain. Son jeu fluide et mélodique et un son velouté font penser à John Abercrombie ou à Pat Metheny. Sur des harmonies d’apparence simple, il développe des soli riches et tortueux, assez bluesy sur les passages en son clair, et nous raconte des histoires passionnantes.

Tout aussi virtuose que son homologue, Tim Motzer est quant à lui plus incisif. Sur des soli également bien développés, son son saturé sonne parfois comme celui d’un un Fender Rhodes. En son clair, sa guitare électro-acoustique lui donne un côté Folk / Blues, surtout lorsqu’il utilise un slide.

Gintas Janusonis, discret quand il joue avec les mailloches, est parfois explosif dans les passages Rock ou Jungle notamment. Eclectique, il a tout un arsenal de percussions à disposition, du chapelet de coquilles à la cymbale chinoise posée sur une caisse claire supplémentaire pour en modifier le son. Son jeu rythmique sur caisse claire / charley est très intéressant. Comme ses camarades, il apporte une couche supplémentaire d’effets sonores en manipulant de la main gauche des potentiomètres tandis que la droite continue de jouer des rythmiques soutenues.

Les chamans modernes

Ensemble ils développent des ambiances inquiétantes qui évoquent les bandes originales de film de science-fiction, tel Blade Runner. Certaines introductions donnent l’impression d’entendre un dialogue dans une langue alien et des bruits sous-marins. Les sons utilisés se rapprochent clairement de l’esthétique des années 80.

La composition du trio fait naturellement penser au duo Bill Frisell et Jack de Johnette sur l’album « The Elephant Sleeps But Still Remembers » mais les ambiances sont ici assez différentes. Là où Frisell jouait plutôt une musique Folk un peu déglinguée, Kurt Rosenwinkel et son trio mélangent d’avantage le Jazz avec un Rock bien appuyé et des ambiances Trip Hop. Certains passages évoquent également les grooves de Soulive et pour ceux plus calmes et éthérés, la musique mystique des indiens d’Amérique du Nord.

Une transe très présente vient renforcer cet aspect mystique de la musique. Les morceaux, denses et fluctuant comme une mer agitée, sont construits de façon similaire. Les bruitages en introduction cèdent bientôt la place à des choses plus acoustiques, au fur et à mesure que le morceau se développe et gagne en intensité. Cette répétition de l’organisation des morceaux ravira les fans mais pourra lasser certains auditeurs(trices).

Bandit 65 est en tout cas un bon groupe de scène. Sa musique est un dialogue spontané, en continuelle évolution, entre les musiciens. L’album à venir sur le label Heartcore (celui de Kurt Rosenwinkel) sortira donc sous la forme qui lui convient le mieux, celle d’un live.

Le label Heartcore

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