Jazz In Lyon

Jazz à Vienne, lundi 4 juillet : Gregory Porter : la magie d’une voix

Suavité et profondeur, décontraction et ironie canaille, et ,par dessus tout, mélodieuse de bout en bout, la voix de ce chanteur californien s’impose depuis plus de dix ans sur la scène du jazz mondial.

Il est devenu l’un des incontournables de Jazz à Vienne. Déjà dix ans que ça dure : en effet, Gregory Porter avait poussé (si l’on peut dire) les portes du théâtre antique pour la première fois il y a dix ans, en 2012. Depuis il n’a cessé de revenir. Laissant au passage quelques beaux souvenirs, que ce soit en petite formation, partageant l’affiche ce soir-là avec Roy Hargrove, ou au contraire, effectuant un joli pas de deux avec l’orchestre national de Lyon.

Cette fois, le chanteur arrive/revient à Vienne en petite formation, c’est à dire en quintet, entouré de quelques fidèles tels Chip Crawford au piano, Tivon Pennicott au saxophone et Emmanuel Harrold aux drums. Du beau monde pour bâtir ce petit monde équilibré que sait faire jaillir presque à tout coup le chanteur.

Chanteur….on insistera évidemment sur le mot ou le qualificatif. Dans le monde du « vocal », ils sont rares en effet les artistes à avoir su imposer la voix, leur voix, aux côtés ou au sein d’instruments ou d’orchestres. Surtout au masculin. En la matière, c’est peu dire que le jeune Californien a fait mouche. Immédiatement. Un timbre de voix, qui mêle suavité, force, profondeur, décontraction et un zeste d’ironie canaille. Qu’on ne s’y trompe pas : c’est rare. Même si Gregory Porter ne se considère pas simplement comme un « crooner », il en a tous les sortilèges. C’est peu dire, tant l’alchimie d’une voix (tel Sinatra), demeure un mystère.

Ajouter à cela un parcours aux belles étapes : une maman plus que sensible à la musique, un apprentissage à la spiritualité qui se lit dans son penchant pour le gospel, une passion pour Nat King Cole, saupoudrée de tout ce qui a germé durant son enfance (dont la soul), une carrière contrariée dans le domaine du sport, et , enfin,une attention particulière au monde dans lequel il se trouvait plongé.

Ajouter surtout à cela une empathie qui se lit autant dans son enfance, dans son parcours, dans ceux qui l’ont aidé à devenir ce qu’il est, et au final, dans ses choix musicaux. Pratiquement, chaque album de Gregory Porter est un évènement, qu’il s’agisse de Liquid Spirit ou de ce si attachant All Rise. Certes, ça ne nous dit rien du récital de ce soir, début d’une tournée européenne passant par Montreux, Marciac, Rome, Berlin, Oslo voire les Etats-Unis. Rançon du succès et du talent. Mais tant mieux : la surprise n’en sera que plus grande.

Ce faisant, Gregory Porter non seulement s’inscrit dans la durée mais vient combler un espace laissé démesurément libre depuis trop longtemps. L’art vocal est ainsi fait que beaucoup s’y essayent mais rares sont ceux qui parviennent à créer ce temps arrêté, où juste la voix compte, qu’elle chantonne un air moult fois rabâché ou qu’elle se lance dans un scat toujours piégeux.

Dans tous ces domaines, Porter excelle.

Quitter la version mobile