Jazz In Lyon

1ère semaine du Rhino Jazz(s) : un Chucho Valdes étincelant et déjà de belles découvertes…

La première semaine du Rhino Jazz qui a démarré le 1er octobre et qui se retrouve cette année à cheval sur la Loire, la Haute-Loire et le Rhône a répondu aux espoirs mis en elle. On ne sait pas encore ce que donnera la suite, mais lors de cette première semaine, les bonnes surprises n’ont pas manqué.

Un Festival a fortiori de Jazz se doit d’avoir des locomotives pour attirer le public.

Il y en a deux cette année : Ibrahim Maalouf qui se produira le jeudi 19 octobre la petite salle Aristide Briand de Saint-Chamond -ça va le changer de l’Accor Arena à Paris…- et le pianiste cubain Chucho Valdes qui s’est produit lui le jeudi 5 octobre à l’Opéra de Saint-Etienne. Un Opéra qui propose 1 200 places, mais qui contrairement aux attentes des organisateurs du Rhino n’a étonnamment pas fait le plein.

Certitude : les absents ont eu tort, vraiment, le pianiste cubain qui était accompagné d’une solide rythmique (avec Horacio Hernandez à la batterie, Armonado Cola à la basse et Roberto Vizcaino aux congas) a produit un concert absolument étincelant.

Le voyant marcher un peu difficilement à 82 ans pour accéder sur scène à son piano, on pouvait avoir d’emblée quelques craintes. Elles furent vite évanouies dès qu’il posa les mains sur les 81 touches de son piano, soulevé, emmené par une section rythmique toujours en avant et jouant la carte de l’émulation.

Dans un registre beaucoup plus intimiste, le tout premier concert du Rhino s’est déroulé dans la petite salle du Chatelard dans la petit commune de Tartaras en Vallée du Gier, proposant un couple musicalement fusionnel : la britannique Phillypia Scammel, une multi-instrumentiste (contrebasse et violoncelle) et son compagnon Rémi Dugué à la guitare.

Son répertoire varié, allant des standards style, la vie en rose à un morceau de Goran Bregovic, en passant par le rock ou la pop matinée de jazz a fait merveille. Un seul regret : qu’elle n’ait pas plus souvent joué de son instrument de prédilection, le violoncelle (un seul morceau) où elle excelle vraiment avec une impro à grimper dans les nuages. Bref, le Rhino qui a débuté dans un endroit improbable, comme à l’ordinaire démarrait fort bien.


La plus belle découverte de la semaine se déroula dans un cadre totalement surprenant : l’immense entrepôt du leader européen du film plastique, la société familiale Barbier, basé à Monistrol en Haute-Loire. Un cadre avec une acoustique étonnante qui accueillait celle qui a le plus fait sensation cette semaine, la chanteuse et multi-instrumentiste cubaine Yilian Canizares qui là encore était fort bien entourée avec le mozambicain Childo Tomas d’une créativité étonnant avec sa basse à double manche et le percussionniste cubain Ernesticco.

Une fantastique alchimie s’est produite lors de ce concert entre ces trois là.

Il est vrai qu’outre sa voix sensuelle et chaude, la chanteuse cubaine est une fantastique instrumentiste chantant et/ou s’accompagnant au violon avec un des impros dignes d’un Stéphane Grapelli des grands jours, la fougue en plus.
A la fois virtuose et spontanée, Yilian Canizares dégage une aura qui devrait la mener loin. Elle annonça d’ailleurs sur scène qu’elle vient de sortir son dernier opus intitulé « Habana- Bahia »

Le Rhino a joué par exemple un rôle négligeable dans le décollage de la carrière de Youn Sun Nah qu’il avait programmé alors qu’elle était totalement inconnue en France. Il se pourrait bien que le même phénomène se déroule davec la chanteuse cubaine, l’avenir le dira…


La dernière découverte de la semaine s’est déroulée dans la petite église de Cellieu, dans la Vallée du Gier où plus d’une une centaine de personnes avaient pris place pour écouter le pianiste Harold Charre, en solo, un HPI, entendez Haut Potentiel Instrumental !

Un vrai génie du piano, totalement habité par sa musique à tel enseigne qu’il fait corps avec son instrument jouant par moment debout, sur les genoux, voire encore couché sur ses 81 touches, selon l’inspiration du moment, à partir de thème connu ou pas connus (autour de la liberté ou de l’amour ou à partir de chansons de Bob Dylan ou de Bob Marley). Il improvise à tout va, emmenant le public totalement subjugué vers des contrées musicales qui auraient pu paraître auparavant inaccessible.

On ne comprend d’ailleurs pas pourquoi ce musicien hors pair à la créativité débordante et qui a tout-de-même sept albums à son actif ne soit pas plus connu. Le Rhino, par le truchement de Ludovic Chazalon, son directeur artistique du Festival l’a heureusement mis en lumière.

De ses touches émane une musique lumineuse, à la fois complexe, sophistiquée, mais toujours très mélodique, très créative, bref in fine une musique populaire dans le vrai sens du terme.
La définition même du jazz !

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